itchio en quelques mots

Photo d'une oeuvre contemporaine dans une exposition: canette sur une table
Œuvre d’Hassan Khan, absurde, à laquelle on donne le sens de notre choix, inattendue mais aussi quotidienne, comme peut l’être itchio (photo prise pendant la période de relecture de cet article, expo à Paris Pompidou 2022)

Sur le parvis d’itchio


Sommaire

  1. Sur le parvis d’itchio
    (Introduction, Appropriation, Découverte, FOMO)
  2. Une agora ou une vitrine virtuelle ?
    (Présentation, Rassemblement international, Jams, Regroupements)
  3. Un laboratoire créatif mondial
    (« le Tumblr des années 2020 », Vagues de non-anglophones)
  4. Reconnaissance et prix
    (Sujet récurrent, Money money, Pas fait pour le JDR, Professionnalisation)
itchio_aperçu trad communautaire_cut

Introduction : quoi, quand, pourquoi ?

Itchio est un site créé en 2013 par leafo, dans le but explicite d’offrir un espace facile d’accès et personnalisable aux « indés » du jeu vidéo.

Par personnalisable, j’entends « sur un modèle horizontal accueillant tout le monde, pour des jeux à tous les prix, sans ponctionner une grande marge ».

Accueillant, ce site l’est : la seule porte d’entrée à franchir, c’est l’inscription gratuite. Pas d’abonnement, pas de pub, pas de fioritures gênantes. Et l’interface assure une prise en main facile.

  • Les questions du prix libre et de l’open source étaient aussi au centre de la réflexion de leafo, dès le départ (comme on peut le lire – en anglais – sur son blog leafo.net)
  • tout comme la problématique des contenus discriminants appelant à la haine (prise en compte très rapidement dans les conditions d’utilisation, itch.io/updates/games-that-hurt-people-arent-cool).

Et pour ce qui est du contenu publié, il s’est diversifié depuis la création du site : en plus des jeux vidéo, on trouve des catégories Assets, Bandes sonores, Comics, (…) et Jeux physiques. Cette dernière est celle qui nous intéresse !

Logo de itch point io

Le logo est explicite sur les origines du site : un stand de vente avec une manette de jeu vidéo et une flèche de téléchargement !

Itchio et les JDR,  petit constat d’une appropriation exponentielle du site

Sans avoir de sources, par simple constat personnel depuis ces quelques années passées à observer itchio, je dirais que c’est à partir de 2019 que les rôlistes anglophones puis francophones ont vraiment envahi massivement ce site. Il y avait bien sûr déjà plusieurs personnes déjà présentes, mais les yeux du monde rôliste étaient dispersés sur d’autres plateformes (notamment sur les groupes Google+, dont la chute en 2018-19 semble avoir accéléré l’ascension d’itchio-rôliste !)

La facilité de prise en main du site a probablement aidé à sa popularisation. Autant que son esprit. Contrairement à DrivethruRPG, itchio est bien moins austère au premier abord. L’interface va plutôt encourager quiconque le souhaite à mettre en ligne ses projets, sans avoir à se sentir pro ou à passer par des remplissages de cases (comme c’est le cas sur Drivethru, où chaque projet nécessite de remplir des cases, cocher des catégories, etc.)

Alors que Google+ fermait et qu’itchio gagnait en popularité mais n’était pas encore aussi prisé, il y a eu des tentatives de regroupement sur d’autres plateformes voire de création de sites dédiés. Même s’il y a eu de belles initiatives, rien n’a décollé – à ma connaissance. DrivethruRPG reste une référence bien en place et garde son rôle de boutique anglophone en ligne la plus populaire, itchio est le « petit nouveau » qui ne cesse de grandir, les autres n’ont pas atteint une forte popularité.

Quelques grands avantages d’itchio :

  • pas de séparation entre “compte éditeur” et “compte client” (donc ça encourage plus facilement à publier ses propres projet)
  • pas de notion de “client” (le site ne donne pas une impression de consumérisme ou de simple boutique en ligne, on est plutôt dans un esprit “grand laboratoire de création de de partage”)
  • une interface accessible pour publier ses contenus (interface aussi accessible que celle d’un blog, au contraire du “compte éditeur” de Drivethru qui est pour l’instant un enchaînement de cases et formulaires pour chaque mise en ligne de projet).

Souvenirs d’une découverte

C’est probablement en 2018 que j’ai découvert la page de Feldo sur itchio. J’avais déjà vaguement connaissance de l’existence de ce site de jeux vidéo indé, mais je venais de découvrir un francophone qui y publiait des JDR ! À ce moment, il me semble qu’il y avait encore peu de JDR sur ce site (c’est en tout cas le seul francophone que j’ai vu) mais je ne m’étais pas trop attardée sur la question. Cette information est restée dans un coin de mon esprit pendant que la vie continuait. Puis, début 2019, je me suis inscrite (je ne sais plus quel était le déclencheur) et la machine était lancée : quelques mois après je tombais dans la frénésie des Jam puis dans le “groupe” de traduction du site. L’anonymat me donnait de l’assurance pour participer aux jams, et près d’un an de PTGPTB me donnait l’assurance de rejoindre la petite “équipe” de traduction d’itchio.

Itchio et la FOMO

Avant de parler vraiment spécifiquement d’itchio, parlons de la FOMO qui peut concerner ce type de site aux contenus quotidiens.

FOMO signifie « Fear Of Missing Out », soit la peur de rater quelque chose. C’est un ressenti entretenu depuis très longtemps par les publicitaires, mais aujourd’hui très présent sur internet et qui peut survenir sur n’importe quel site : c’est une forme de dépendance (aux réseaux sociaux, par exemple).

C’est ne pas pouvoir se passer de son téléphone par peur de ne pas recevoir et répondre à temps à une invitation à une fête, c’est la peur de ne pas être au courant des derniers jeux sortis, ou simplement la peur de manquer un fil passionnant sur Twitter, ou même de connaître le dernier meme drôle à la mode. C’est, par définition opposée, l’impossibilité de passer une journée (ou plus) déconnectée des informations du monde social, en ligne ou non.

Cette peur peut apparaître quand on s’inscrit sur un nouveau site, qu’on commence à en comprendre les codes et à suivre des participantes ou du moins les sorties. Itchio ne fait pas exception. Depuis 2019, il y a de plus en plus de créateurices de JDR qui s’inscrivent et y publient leurs jeux. Il y a aussi de plus en plus de game jam (défis) dédiées aux JDR. Et c’est sans compter les autres contenus (textes, jeux vidéo, etc.). Il y a beaucoup d’informations et de choix. Tous les jours. On peut facilement ressentir une impossibilité de suivre toutes les sorties, voire de la saturation.


Pour éviter la FOMO, pas de secret, c’est comme pour tous les sites et réseaux sociaux :

    • si vous ressentez cette angoisse mais à un niveau raisonnable :
      • vous pouvez de temps en temps vous déconnecter de votre ordinateur ou votre téléphone quelques heures, voire sortir un peu ou méditer,
      • vous pouvez noter sur papier ce que vous avez vu/lu aujourd’hui pour apprendre à apprécier vos quelques découvertes tout en vous auto-démontrant qu’il est impossible de tout suivre (et que ce n’est pas grave),
      • ou vous pouvez créer votre « bulles d’informations », en sélectionnant quelques personnes/blogs/sites, sans chercher à suivre absolument chaque nouvelle parution de tout le monde.
    • si cette angoisse vous fait souffrir, vous cause du stress, vous empêche de bien dormir, de vous concentrer ou pire, et que vous ne parvenez pas à vous passer de votre ordinateur ou téléphone : vous avez probablement besoin d’aide extérieure (aide psychologique ou soutien pour apprendre à méditer, etc.). Cela peut arriver, courage.

Itchio peut donc être source de cette peur nommée FOMO, mais c’est aussi un site aux contenus très variés, avec beaucoup de jeux invitant à la bienveillance envers soi-même. De nombreux petits JDR ou Larp (GN)  vous invitent à prendre soin de vous, pendant ou juste après une partie : prendre un thé, un bain, se promener sous les arbres, penser à des choses positives, etc. Je suis persuadée que ces petits jeux peuvent servir de conseils, ou en tout cas d’inspiration, pour vous éviter des peurs comme celle-ci.

Une agora ou vitrine virtuelle ?


Sommaire

  1. Sur le parvis d’itchio
    (Introduction, Appropriation, Découverte, FOMO)
  2. Une agora ou une vitrine virtuelle ?
    (Présentation, Rassemblement international, Jams, Regroupements)
  3. Un laboratoire créatif mondial
    (« le Tumblr des années 2020 », Vagues de non-anglophones)
  4. Reconnaissance et prix
    (Sujet récurrent, Money money, Pas fait pour le JDR, Professionnalisation)
Photo d'un groupe de suricates, des petits mammifères très connus pour vivre en communauté et veillant les uns sur les autres
crédit photo: Anggit Rizkianto (Unsplash)

Présentation : les outils communautaires/sociaux du site


Si vous ne connaissez pas ce site, voici une petite présentation de ce qu’il propose en termes d’outils pour discuter avec d’autres personnes.

Il faut savoir qu’itchio n’est pas un réseau social et n’a pas été conçu comme tel. Mais ce n’est pas non plus une simple vitrine marchande. Le site dispose de :

  • un forum (“communauté”) global avec de nombreuses sous-sections
  • un forum pour chaque game jam
  • un forum ou une section commentaires pour chaque projet/jeu (avec la possibilité de choisir entre les deux ou bien de désactiver cela ; la case cochée par défaut étant le format commentaires)
  • une fonctionnalité d’abonnement aux autres comptes
  • un “fil d’actualité” (“flux”) global des dernières sorties, remplies donc de jeux vidéo
  • un “fil d’actualité” personnel de ce qui a été noté ou sauvegardé par les personnes que vous suivez
  • des notifications mail automatiques envoyées aux personnes qui vous suivent, dès que vous postez un nouveau projet ou un “journal de développement” (devlog) sur un projet déjà existant (chaque notification listant tout cela en 1 seul mail, vous ne recevez heureusement pas un mail par personne que vous suivez).

Itchio n’est pas un réseau social


Il n’y a ni messagerie privée, ni “likes & réactions”, il n’est donc pas possible d’utiliser ce site comme un réseau social. Il faut plutôt l’envisager comme un mélange entre sites perso, blogs et forums.

Vous pouvez cependant mettre sur votre page “Profil” vos liens, en sachant que votre Twitter et votre site seront mis en avant tout en haut de la page, ce qui permet de rediriger les personnes vers des lieux où vous contacter si vous le souhaitez. Mais il n’est pas possible de contacter quelqu’un directement sur itchio, en dehors des commentaires sur ses projets.

Itchio peut servir de vitrine


Vous pouvez décider de n’autoriser aucun commentaire sur vos pages et de n’utiliser aucun des outils que j’ai listés plus haut. Il est donc possible de faire de votre compte itchio une sorte de vitrine que les gens peuvent parcourir sans avoir la possibilité d’interagir avec vous directement.

C’est ce que j’ai fait pour le profil de La Caravelle, mon objectif étant de rendre ces jeux “libérés” (gratuits) plus simples à trouver et à télécharger, sans avoir à gérer des commentaires sur des jeux qui ne me concernent pas forcément. Je n’ai, pour l’instant, vu personne utiliser son compte de cette manière ; et je trouverais cela dommage si ça se développait car ce site a encouragé beaucoup de personnes  à démystifier la notion d’auteurice et à les considérer comme des gens “normaux” à qui on peut parler.

Rassemblement (et visibilité ?) des communautés du monde entier


Ce site semble accessible à tous les pays du monde, du moment que vous avez une connexion internet. N’importe qui peut s’y inscrire et y publier des fichiers, en tout cas des fichiers gratuits (qui ne nécessitent pas de remplir l’unique formulaire barbant d’itchio concernant les trucs juridiques).

Une fois l’inscription faite, ses principales sections sont disponibles en plusieurs langues via les paramètres du compte. La traduction étant communautaire, cela permet de pouvoir toucher encore plus de monde (toutes les langues sont acceptées, il suffit de se proposer pour “ouvrir” la traduction à une nouvelle langue). L’outil de traduction communautaire est aussi facile à comprendre qu’à utiliser, ce qui a encouragé pas mal de personnes à proposer des bouts de traduction pour plein de langues différentes. Résultat : l’ouverture d’itchio à de plus en plus de personnes non-anglophones s’est fait assez rapidement.

Comme en témoigne la façon de traduire le site, itchio est organisé de manière horizontale : aucune personne, jeu ou communauté n’est mise au dessus des autres, il y a des mises en avant temporaires mais pas de hiérarchisation des contenus ou des participantes ; le développeur principal du site est accessible également, même si très occupé, il est présent sur les réseaux et répond (dans une mesure humaine) aux messages. On n’est pas dans la cogestion ou l’anarchie, mais il y a quelques similitudes 🙂

L’interface de recherche dessert cependant les communautés et la découverte des projets, car on pourrait surnommer le site de “joyeux bordel où chaque projet est une micro-aiguille dans une giga-botte de foin” . De mon point de vue, c’est ici la “faute” à un manque d’informations sur cette horizontalité : quand on s’inscrit, on peut directement mettre en ligne des fichiers, sans avoir au préalable d’indications sur les catégories, tags et métadonnées (qui pourraient permettre des recherches organisées, si seulement chaque personne ajoutait ces étiquettes, mais il est rare que ces sections soient vraiment remplies). Pour un site dédié aux jeux vidéo, c’est un comble de voir que le tuto n’est pas complet 🙂

Je dirais donc que, de façon générale pour les personnes et leurs projets, ce site attroupe mais ne rassemble pas.

Les jams, des défis plus ou moins rassembleurs


Une façon de se rassembler est de participer aux game jams. Il s’agit de défis de création, dont vous avez déjà entendu parler sur ce blog. N’importe qui peut lancer une jam, n’importe qui peut la rejoindre. Elles peuvent être notées et avec récompenses, comme des concours, mais la grande majorité sont simplement des défis sans classement ni trophée.

Ce sont de beaux évènements. Mais j’y vois deux soucis principaux : leur manque de visibilité et leur faible taux de participation active.

Manque de visibilité

Je dis qu’il y a un manque de visibilité car il y a énormément de jams tout le temps et, même si l’ajout d’un filtrage plus précis est une demande faite au développeur depuis longtemps, on ne peut toujours pas les trier par type de participation attendue (type “Physical game, Video game, etc.”). Bon, certaines sont titrées TTRPG (l’acronyme anglais pour JDR), mais ce n’est pas souvent le cas.

Ci-contre : capture d’écran de la page des jams organisées en même temps. Chaque segment coloré correspond à une game jam (oui, tous ces défis ont bien lieu en même temps !). Note : les couleurs ne correspondent à rien, elles sont vraiment juste aléatoires, game jams de jeux vidéo, de jeux de rôles, d’écriture ou de création plus libre, tout est visuellement mélangé.

Heureusement, lorsqu’un site ne propose pas un outil nécessaire, certaines personnes le font elles-mêmes. À défaut d’avoir un filtre “Physical Games” sur le site, quelques personnes s’organisent depuis 1 an pour répertorier manuellement les jam de JDR. L’initiative est louable mais c’est beaucoup de boulot et d’énergie dépensée, je ne sais plus qui est derrière cette page, alors je doute que cette personne la maintienne encore des années : physicalgamejams.carrd.co

Pour connaître sinon les jam en cours, une solution est de suivre les personnes et communautés qui en parlent beaucoup, voire les organisent.

Capture d’écran de la page Physical Games Jams.carrd.co, une liste de toutes les jams, avec leurs dates de fin et le pseudonyme de la personne ayant lancé cette jam

Faible taux de participation

Lorsque je parle de faible taux de participation active, j’entends le peu d’échanges sur le “forum” de la jam, et le peu de créations en équipe. Même sur les jams comptant beaucoup de projets participants, les forums sont souvent assez silencieux et chaque projet soumis créé par une seule personne plutôt qu’une équipe. Les jams ne sont donc, majoritairement, pas un outil de rassemblement en soi.

Les jam faisant exception à ce constat sont généralement organisées soit par des personnes ayant déjà une grande “fanbase”, soit pour créer du contenu autour de jeux déjà populaires. Mais sans communauté, jeu ou auteurice populaire promouvant la jam, il y a peu de chance qu’il y ait un engouement autour de celle-ci : ce seront les mêmes personnes qui en auront connaissance et y participeront.

Par contre, participer à certaines jams peut vous motiver à créer quelque chose, vous faire rencontrer d’autres personnes, vous ouvrir à d’autres types de créations, mais l’émulation se fait souvent ailleurs que sur le forum de la jam. Certains forums, plutôt que des lieux de discussion, sont utilisés comme des lieux de partage de conseils et liens utiles, ce qui est plutôt pas mal aussi.

Les jams peuvent autant encourager ou décourager à se lancer dans un projet

Ce manque de visibilité mais aussi l’émulation qui se fait ailleurs que sur itchio (dans une communauté n’utilisant ce site que pour son aspect pratique de mise en ligne), ce sont des constats que l’on est plusieurs à faire. Et, bien sûr, selon la communauté, sa bienveillance et son accueil, cela peut encourager ou non à participer.

C’est, entre autres, un constat fait par axoona qui compte 37 projets (JDR, zines, JV) créés à l’occasion de jams sur itchio ! Après avoir participé à tant de jams, voici sa conclusion :

« sur les jams JV (jeu vidéo) je suis tombée plusieurs fois sur les communautés pas bienveillantes, LDJam (Ludum Dare Game Jam) est devenu toxique au bout d'un moment, puis sur itch aussi ça a débarqué aussi, ça m'a découragé et j'ai même arrêté de créer les jeux jusque découvrir la jam AGBIC, puis j'ai découvert le monde des zines et JDR qui étaient très accueillant, très ouvert, je me suis vraiment sentie chez moi

 

je me demande si le fait que mon jeu qui a le mieux "cartonné" : Neko The black Cat - pick-your-path adventure mini-zine qui est mon premier zine, mais fait dans le cadre d'une jam principalement jeu vidéo mais que j'adore (ma 2nde participation à AGBIC), est-ce que cela n'a pas orienté ma création vers les zines pas la suite ? – grande question existentiell

 

en tout cas on trouve de tout sur itch, des communautés très acueillantes et j'ai fait plein des belles rencontres avec des gens avec qui je continue d'entretenir des liens et que j'adore, alors qu'au début j'ai juste suivi un lien twitter

 

mais aujourd'hui de façon générale j'évite les jams qui sont notées et dont je ne connais rien d'orgas, car souvent sur ce genre des jams, mes créations qui sont plutôt niche, se retrouvent trollées, et c'est pas agréable, et en discutant avec d'autres créateurices on s'est renduz compte d'avoir eu le même vecu

grace aux communautés jv comme pang pang club ou bitsy créer les jv est redevenu une joie pour moi »

– axoona (axoona.itch.io)

D’après son expérience, les jams sont perçues bien plus souvent positivement que négativement (seulement 3 mauvaises expériences, et uniquement sur des jams de jeu vidéo !). Un des aspects positifs étant les liens qui peuvent se créer avec de nouvelles personnes et communautés. Certaines commu peuvent aussi redonner du plaisir à créer.

Feldo, lui, a connu les game jams présentielles de jeux vidéo. C’est donc assez logiquement qu’il a participé et même organisé des jam, comme vous le verrez dans un prochain article témoignage. De jeux vidéo (plus spécifiquement de jeux d’arcade et de fictions interactives) puis de JDR.

« Le phénomène “game jam” a commencé en proposant de créer des jeux vidéos, mais s’ouvre de plus en plus aux autres créations. En parallèle à ça, le succès des jeux de plateau, et plus récemment le renouveau du jeu de rôle, ont fait bouger les lignes à ce niveau

 

C’est dans cette ambiance propice à la création ludique multi-formes, posée depuis quelques années maintenant, que j’ai posté en 2018 sur mon compte itch.io deux petits jeux que j’avais d’abord diffusé de manière confidentielle au sein d’un collectif artistique local (nommé “Numéro Zéro”).

 

Quoiqu’il en soit, grâce au dynamisme du site itch.io, et à l’ouverture progressive de certaines game jams à d’autres formes de jeux (sans compter les jams désormais directement axées JDR), il y a vraiment de quoi faire ! J’organise d’ailleurs chaque année une jam en hommage à Douglas Adams et qui accepte toutes sortes de participations ;) Elle se termine chaque 24 mai avant le jour de la serviette. itch.io/jam/towel-day-warm-up-2022

 

– Feldo (feldo.itch.io)

Dereel, qui participe régulièrement à des défis de création de jeux courts, a aussi un avis positif sur les jams, lui aussi très porté sur les personnes plutôt que sur l’évènement en lui-même :

« Les jams avec des sujets légers, comme la One page jam de Lennox sont de grandes occasions de rencontres. On se trouve des affinités et on garde des liens. Cela fait de petits réseaux qui partagent compétences, découvertes, conseils, mais aussi réassurances et entrepromotion. On ne peut pas savoir ce que donnera une jam, mais comme une fête, il y a toujours au moins ce qu'on y apporte  Dans le cas où le sujet est plus sérieux et où chacun.e est dans son coin, ça reste un excellent marque-page de jeux et de contacts (tant que les collections ne sont pas marquables/navigables).

 

Pour moi, itch est un exemple de navigation dans un savoir vivant : on ne sauvegarde pas tant des collections ou des jeux (ceux qu'on utilise, on les télécharge, simplement) que des créateur.ices et des prescriptrices pour se repérer dans le flux constant de créations inétiquetables. »

 

– Dereel (dereel.itch.io) 

Donc, dans certaines jams, il reste possible de rencontrer, créer ensemble, garder contact, entrer dans de nouvelles communautés numériques.

Les regroupements se font en extérieur

Le forum général semble actif du côté jeux vidéo, mais est bien plus calme dans la section Jeux physiques. Elles sont rares les fois où j’y jette un œil, mais les derniers messages ont toujours plusieurs semaines. Ce site n’est pas vraiment utilisé pour ça, mais cela n’est pas étonnant vu que les communautés semblent déjà plus ou moins formées ailleurs avant de s’installer sur itchio.

Il existe également un serveur Discord itchio, créé en 2019. Il est aussi plutôt calme, et ce n’est que lorsque j’ai demandé fin 2019 la création du salon Analog Games que leafo l’a ajoutée. Ce développeur est à l’écoute des suggestions mais n’y avait pas pensé dès le départ, comprenons-le ce n’est pas sa priorité mais – on verra encore une fois plus tard dans cet article – il ne néglige pas les JDR et les met parfois en valeur. On peut avoir bon espoir que la place accordée aux JDR sera de plus en plus conséquente et complète.

Mais, tout comme le forum, ce salon Discord est peu actif car les gens communiquent ailleurs : sur leurs propres serveurs Discord ou sur leurs réseaux sociaux.

Twitter semble être le principal réseau social utilisé par les personnes présentes sur itchio, mais mon point de vue est potentiellement biaisé car je ne fréquente régulièrement que celui-ci. Certaines personnes communiquent aussi sur Instagram (quelques JDR utilisent même ce format d’images carrées) ou encore des plateformes vidéo comme TikTok, Twitch et Youtube (pour communiquer sur leurs sorties de jeu mais aussi partager leurs théories du JDR voire lancer des discussions dans leurs commentaires).

Sur les réseaux, les rassemblements et potentielles découvertes (de projets ou d’autrices) peut se faire via les différents outils habituels de chaque réseau, comme les suggestions d’abonnements à des comptes ou bien via les hashtags. Sur Twitter, vous pouvez découvrir du contenu JDR régulier via les hashtags #TTRPGcommunity #TTRPGsolidarity, #SelfPromoSaturday #5StarsFor5Stars #FollowFriday ou encore #TreasureChestFriday.  Il y en a encore d’autres, mais cela sort un peu du cadre de cet article sur itchio, donc on verra peut-être ça plus tard dans un autre article ! Il existe aussi quelques tags pour les contenus francophones, mais ils sont pour l’instant minoritaires.

Sur Discord, la notion de groupe est plus présente que sur les réseaux, vu qu’il s’agit d’une plateforme de discussions  et non d’un réseau social. Il existe de nombreux serveurs Discord autour du JDR en général, ou de types ou systèmes de jeux en particulier, autant francophones qu’anglophones. Ce sont sur ces groupes-là que nombre de créatrices de jeux discutent, échangent et s’entraident. Leur unique point commun est parfois de publier leurs créations sur itchio, mais c’est déjà une chose qui leur suffit souvent à faire  « communauté. »

Plusieurs communautés, chacun sa bulle ?

Ce site est donc un nouveau lieu qui rassemble des communautés préexistantes du monde entier, qui communiquent surtout ailleurs (Discord et Twitter). Mais les liens entre ces communautés sont-ils fréquents ou s’agit-il de plein de petites bulles/huis clos ?

Eh bien, je n’ai pas vraiment de réponse à cela. Itchio peut être indirectement un lieu de découverte et de partage, mais il faut soit fouiller un peu en regardant les profils des créatrices et les jeux suggérés par l’algorithme, soit déjà suivre certaines personnes ou communautés qui font elles-mêmes une veille des sorties et des jams (en partageant alors leurs découvertes sur leurs réseaux, Discord, newsletters ou en faisant des collections publiques sur itchio).

La bonne nouvelle, c’est que les membres de la communauté Discord CestPasDuJDR font cette veille et sont même capables de vous rediriger vers d’autres serveurs et communautés selon vos intérêts ! 🙂

Un laboratoire créatif mondial


Sommaire

  1. Sur le parvis d’itchio
    (Introduction, Appropriation, Découverte, FOMO)
  2. Une agora ou une vitrine virtuelle ?
    (Présentation, Rassemblement international, Jams, Regroupements)
  3. Un laboratoire créatif mondial
    (« le Tumblr des années 2020 », Vagues de non-anglophones)
  4. Reconnaissance et prix
    (Sujet récurrent, Money money, Pas fait pour le JDR, Professionnalisation)
Photo de panneaux signalétiques colorés indiquant plusieurs pays, chacun à plusieurs milliers de km
crédit photo: Emeric Deroubaix (Unsplash)

Itchio, le tumblr des années 2020 ?

Itchio me fait grandement penser à « l’esprit Tumblr » des années 2010. En tout cas, l’esprit que j’en ai perçu à cette époque.

Tumblr est un site mélangeant les principes du blog et du partage : vous créez votre blog personnel dont les articles ou galeries d’images s’affichent en flux, vous pouvez suivre les autres blogs classés par “centre d’intérêt commun”, et vous pouvez repartager les posts des autres sur votre propre blog.

Ce que j’appelle « l’esprit Tumblr » est un site facile d’utilisation, ouvert à tout le monde sauf à la pub, dans une ambiance de partage d’images et de gifs, très axé sur de l’art flashy, de la BD, des gifs humoristiques et beaucoup de “fandom” (niches de fans). C’était en tout cas mon expérience de cette plateforme, et je retrouve un esprit similaire d’émulation créatrice sur itchio.

Si vous connaissez, c’est un peu la même ambiance diffusée par l’émission Tracks d’Arte : des sujets de niche, hors-normes, des personnes qui créent des choses sans censure et se regroupent autour de leur passion. Sur itchio, presque chaque JDR publié est une plongée dans un nouvel univers, souvent queer, hors des normes ou excentrique.

Itchio est donc, de mon point de vue, un laboratoire artistique qui donne la parole à tout le monde. Les créations postées n’y sont pas forcément finies, pas forcément conventionnelles, et c’est une très belle chose que tout ça soit réuni dans un même endroit.

Des vagues de non-anglophones

On trouve des projets dans différentes langues, que ce soit bilingue (avec l’anglais) ou uniquement dans leur langue natale.

Récemment, j’ai remarqué qu’il y a eu des vagues de JDR en italien et en portugais-brésilien. Cela vient par vagues, soit lors de l’inscription d’une ou quelques nouvelles personnes (qui mettent en ligne tous leurs projets déjà créés d’un coup), soit lors de jam (organisées par une communauté). Ces jeux sont souvent proposés dans deux langues (à la fois dans leur langue natale et en anglais).

Dans ce labyrinthique laboratoire virtuel, on peut donc tomber sur des jeux inspirés par des cultures différentes (et enfin créés par des personnes concernées !). De plus en plus, ces personnes et communautés s’organisent pour rendre l’accès à ces jeux plus simple, en organisant des jam dédiées, en utilisant des hashtags sur les réseaux ou en créant des collections sur itchio.

Par exemple, pour les créations publiées par des personnes originaires d’Amérique du Sud, il y a eu plusieurs jams, le hashtag #RPGLatam et la collection plus spécifique Brazilian Games. Une autre communauté grandissante est celle pour les personnes d’Asie du Sud-Est avec le tag #RPGSEA et même un site, un compte twitter et une newsletter dédiée @across_rpgsea. Une nouvelle communauté grandissante est la Kiwi, pour la Nouvelle-Zélande, avec des bundles réguliers, le tag #KiwiRPG et le site kiwiRPG.com.

Reconnaissance et prix


Sommaire

  1. Sur le parvis d’itchio
    (Introduction, Appropriation, Découverte, FOMO)
  2. Une agora ou une vitrine virtuelle ?
    (Présentation, Rassemblement international, Jams, Regroupements)
  3. Un laboratoire créatif mondial
    (« le Tumblr des années 2020 », Vagues de non-anglophones)
  4. Reconnaissance et prix
    (Sujet récurrent, Money money, Pas fait pour le JDR, Professionnalisation)
Photo de billets de dollar en train de brûler
crédit photo: Gabriel Meinert (Unsplash)

Dans toutes les communautés et réseaux, un sujet revient souvent : la reconnaissance de la valeur du travail produit pour créer ce qui est publié sur itchio. Que ce soit la valeur culturelle ou financière.

Un sujet récurrent dans les milieux de la création

Le sujet de la valeur et de la reconnaissance du travail fourni n’est pas propre à itchio, mais il revient sans doute régulièrement car il n’a jamais été résolu et car il y a régulièrement de nouvelles personnes qui le découvrent. Depuis des décennies (voire, depuis toujours ?), que ce soit en France, en Europe ou ailleurs dans le monde, le statut des artistes et des créateurices d’œuvres est précaire. C’est un très gros sujet bien référencé par les artistes elles-mêmes ainsi que par la sociologie de l’art, je ne m’étendrai pas dessus mais vous pouvez vous plonger dans quelques textes sur cairn.info.

Les personnes présentes sur itchio en reparlent régulièrement, car cela les touche directement : elles passent de nombreuses heures à penser, concevoir, créer, tester, promouvoir et mettre en ligne leurs créations. C’est effectivement un choix de leur part de prendre de leur temps pour faire tout cela, mais elles peuvent s’accorder sur le fait que toute création mérite reconnaissance, même symbolique.

Certaines personnes se lancent à plein temps là-dedans mais, comme dans tous les milieux de la création, la plupart ont un boulot alimentaire (day job) à côté ou font simplement ça en tant que passe-temps ponctuel. Ce qui crée un décalage entre les projets et enjeux de ces trois groupes de personnes. Ce qui entraîne cycliquement le passage de gratuit à payant de certains projets, avec ou non ajout de « copies suspendues » (exemplaires téléchargeables gratuitement).

Money money money… n’est pas ici ?

Ce qu’il y a de bien avec les personnes présentes sur itchio, c’est qu’elles sont nombreuses à partager un même état d’esprit, notamment celui de la transparence. On peut donc régulièrement lire des bilans sur leurs gains financiers, leurs pertes, etc. Avec une analyse au fil des années, sur ce qui “marche” mieux ou pas, sur ce qui les motive ou pas (spoiler : l’argent n’est pas leur moteur principal, sinon elles ne créeraient pas du JDR !), sur leurs projets qui ont été ou non populaires, sur les plateformes utilisées et sur leur ressenti personnel.

En bref, voici ce que j’en retiens :

Itchio ne rime pas avec argent et consumérisme

  • Ce qui ramène de l’argent, ce sont les jeux à licence ou les suppléments de gros jeux (l’or est chez les dragons, c’est bien connu)
  • Les gens qui achètent de façon consumériste se trouvent sur Drivethru, DM Guilds et ce type de plateformes, ainsi que sur les plateformes de foulancement. Ce type de sites semblent d’ailleurs plus « publicitaires » alors qu’itchio est un joyeux bordel (que l’on peut apprécier voire préférer).
  • Il y a parfois des exceptions, lorsqu’une « personnalité » est impliquée dans le projet (car, sur Internet, le marketing et la popularité sont reines, comme dans les autres milieux de la création).

Itchio rime avec solidarité

  • Itchio est consulté comme un lieu plein de curiosités gratuites et à prix libre et les personnes qui font des dons sont souvent elles-mêmes créatrices (on connaît mieux la valeur d’une création quand on crée soi-même, peu importe notre propre « niveau »).
  • Les gros bundles caritatifs sont très beaux éthiquement, et utiles pour les assos qu’on aide mais pas pour les créatrices car ils génèrent uniquement des téléchargements en masse, sans retours (ou très très peu). Et, de façon logique, les petits bundles collectifs sont plus propices à ce que les gens s’arrêtent véritablement sur votre création et votre compte.
  • De temps en temps, les bundles sont utilisés comme des cagnottes :
    • des créateur-ices font un bundle de leurs propres jeux, ou reçoivent un bundle de soutien, pour pouvoir se rendre à une convention ou payer des frais médicaux, etc. Selon la popularité de la personne en question et de celles qui l’aident, ces bundles-cagnottes peuvent avoir du succès.
    • certaines proposent des bundles (collectifs) qui permettent d’acheter plusieurs licences de logiciels (mise en pages, etc.), pour ensuite les distribuer à qui en a besoin.
  • Dans la sphère anglophone, il est fréquent de voir passer des appels et invitations ouvertes à participer à des podcasts ou parties filmées pour parler de votre jeu publié sur itchio. Les vidéastes et podcasts francophones sont moins nombreux-ses, c’est donc moins fréquent mais ça se fait aussi. Cette visibilité peut contribuer à faire connaître le jeu et donc, indirectement, générer quelques ventes, dons ou nouvelles abonnées.
  • Certains projets collectifs publiés sur itchio sont exclusifs à cette plateforme, créés par des personnes qui se sont rencontrées grâce à ce site ou aux communautés liées, et pratiquent un partage de revenu en « système D » quand ils sont payants comme le InDie Zine ou le Far Horizons Coop (mais il y en a des gratuits et même des francophones, comme le 1D Zine cestpasdujdr.fr/1dzine-lancement-dun-fanzine-par-la-commu-cestpasdujdr)

Mais certains projets se monétisent mieux que d’autres

  • Ce qui « paye le mieux » sur itchio, ce sont les bundles.
  • Le « itch-funding » était déjà plus ou moins utilisé avant qu’on le nomme et ça s’est popularisé depuis plus d’un an, mais l’issue dépend encore quasiment uniquement de la popularité de l’autrice ou bien de celle du jeu lui-même, même dans les initiatives collectives de type ZineMonth.
    Note : Le « itch-funding » n’est en réalité pas du crowdfunding mais de la prévente en système D via itchio.

    Vous pouvez retrouver une belle analyse du ZineMonth, traduite par Matthieu sur ce même blog cestpasdujdr.fr/une-analyse-du-zine-month-2022.

  • Il y a encore peu de maisons d’édition établies qui ont investi itchio, mais certaines petites (anglophones) semblent y être nées (certaines créatrices se sont lancées dans l’édition après avoir eu leur page itchio personnelle) et ne cherchent pas le profit à tout prix, sont plutôt dans un esprit de partage des jeux qu’elles apprécient.
  • Les personnes sur itchio cherchent généralement plus une mise en valeur du travail effectué/temps passé qu’un gain d’argent :
    • De nombreuses personnes se sont décidées depuis 1 an à mettre leurs projets en payants, en ajoutent toujours des community copies (exemplaires téléchargeables gratuitement pour les personnes qui ne peuvent pas payer) – ce qui se fait quand même assez peu sur les autres sites (voire… jamais ?)
    • Plus récemment, certaines ajoutent le temps approximatif passé sur chaque projet, qu’il soit gratuit, en prix libre ou payant, pour que les personnes qui n’ont pas l’habitude de créer comprennent que c’est du boulot et que ça peut prendre beaucoup de temps (et de savoir).

Le site n’aide pas à la reconnaissance…

  • Itchio place les projets en prix libre… dans la catégorie gratuit.

Je ne sais pas pourquoi ce choix a été fait aux origines du site, car un jeu vidéo à prix libre ne devrait pas non plus être considéré comme gratuit, mais c’est un fait qui aujourd’hui impacte les JDR et toutes les autres créations présentes sur itchio. À mon sens, les jeux en prix libre devraient être dans les catégories de prix correspondantes à leur prix suggéré ou bien avoir leur propre catégorie à part – qui sait, ce sera peut-être le cas un jour lointain.

En attendant, il est fréquent de voir des jeux passés en payants (avec jusqu’à 999 exemplaires gratuits) ou bien des jeux « en réduction -100% » sur des durées de plusieurs années, pour les diffuser en prix libre sans les faire tomber dans la catégorie gratuit.

Dans tous les cas, c’est une des raisons pour lesquelles le débat du prix est souvent relancé. Et probablement une des raisons qui persuade les gens qu’itchio est « le lieu du gratuit » au contraire de Drivethru par exemple qui a vraiment une apparence-type de boutique et est consulté de manière consumériste.

…Mais le(s) dév mettent en valeur tous les contenus

  • Le site met parfois en valeur des JDR et autres contenus non-vidéoludiques dans ses actus et ses bundles « officiels » (les « Tabletop Selects » à retrouver sur itch.io/blog). C’est le cas depuis longtemps, ou au moins 2018 (on peut retrouver des articles de recommandations de contenus non-vidéoludiques dans leurs anciens articles de blog).
  • Le développeur principal du site est à l’écoute de toutes les demandes, et pas que celles concernant le jeu vidéo (comme j’en parlais plus tôt avec l’ouverture du salon Discord « Analog Games » pour parler JDR et JDP).
  • Tous les contenus sont bienvenus et cohabitent dans les très grands bundles, ceux qui sont si grands qu’ils ont fini par être gérés par l’équipe du site elle-même : jeux vidéo, récits, assets, musiques, JDR, etc. (on peut retrouver la liste des 4 gros bundles sur RandomBundleGame.com).

Itchio n’est pas fait pour le JDR

Même si le JDR a envahi ce site et est très bien accueilli par l’équipe qui le gère, on ressent encore qu’il n’est pas fait pour ce type de jeux :

Cohabitation des projets

Tous les projets (jeu de rôle classique, GN/larp, JDR en ligne, jeu expérimental, jeu-poème, jeu de société, jeu de cartes, etc.) cohabitent sous le même label « Jeux physiques » / Analog games.

Il y a aussi cohabitation des JDR et autres « jeux physiques » face aux sections jeux vidéos, livres, comics, etc. alors que ces sections s’entremêlent et n’ont pas forcément de frontière nette dans nos créations (par ex. quand un Asset est créé pour du JdR ou quand une jam accepte tous les types de contributions).

Fonctionnalités manquantes

Une fonction très réclamée, depuis des années, est celle du partage de revenus. Les sites comme DrivethruRPG et Lulu ont cette fonctionnalité qui permet de morceler en pourcentages les revenus générés par un projet, redistribués entre plusieurs personnes autrices. Je ne sais pas si c’est pour des raisons légales ou logistiques, mais Itchio n’a malheureusement pas de telle fonction pour les projets qu’on y publie, alors que la fonctionnalité existe lorsque l’on crée un bundle réunissant plusieurs projets. Cela ne facilite donc pas la publication de projets collectifs payants, mais ne l’empêche pas car les gens ont su trouver des alternatives en systèmes D.

D’autres fonctionnalités pourraient également améliorer le site, de notre point de vue de rôliste transcendant les frontières mondiales, notamment sur les devises monétaires. Pour l’instant, la devise est par défaut le dollar américain mais chaque créateur-ice peut le changer pour la devise de son propre pays (pour tous ses projets, pas au cas par cas !). Les prix s’affichent donc selon le choix (ou le non-choix) de la créatrice et non selon votre propre pays en tant qu’acheteur-ice ! Pour aller plus loin, cette fonctionnalité pourrait montrer ce que vaut vraiment tant de dollar américain plutôt que simplement convertir dans votre devise : car 2$ US valent environ 2€ et le pouvoir d’achat est assez proche en France, mais 2$ US valent 10 Reals brésiliens et cela permet d’acheter bien plus de choses qu’aux USA ou en France !

C’est une idée qui nous est apparue lors d’une discussion avec l’autrice brésilienne wendi yu (que j’ai interviewée à propos de son jeu Mélodieuses Mutations et Merveilleuses Musiciennes cestpasdujdr.fr/interview-de-wendi-yu)

Même si l’équipe de dév du site est à l’écoute, elle n’est pas en mesure (pour l’instant ?) de répondre à toutes les demandes et le site ne semble pas être fait par des rôlistes. Ça se ressent mais ça n’empêche pas aux personnes, associations et maisons d’édition de s’emparer de ce site et de se débrouiller en système D pour mettre en ligne leurs beaux projets.

Un aspect de plus en plus pro… et intimidant ?

En 2021, j’ai remarqué qu’il y avait de plus en plus de projets « léchés » visuellement. C’est à confirmer mais je pense que c’est dû à plusieurs choses :

  • l’arrivée de plusieurs maisons d’édition « pro » ou « semi-pro »
  • la mise en ligne de projets foulancés (sur Kickstarter ou ailleurs)
  • le partage de conseils et ressources, l’entraide entre les créateurices
  • la popularisation d’Affinity Publisher, de Canvas, et des modèles préconçus de traitement de texte.

Mais on peut se poser la question : est-ce une tendance générale ? Car la question se pose aussi sur les projets du ZineQuest et du ZineMonth… des évènements visant à produire des zines, dans un esprit DIY/fait-maison pas toujours « respecté ». Les jeux-zines sont de plus en plus gros, et de plus en plus lourds à gérer. Alors je suis totalement pour la production mais cela ne doit jamais dissuader des « amateur-ices » de se lancer. Je suis aussi très contente de voir tout cela, tant que n’importe qui ne se revendique pas (et se fait rémunérer en tant que) designer graphique (laissez-moi être payée pour la seule très longue formation que j’ai faite SVP ahah) ou éditrice, traductrice, ou tout autre boulot du secteur de l’édition ou de la création.

En plus des projets de plus en plus « audacieux » visuellement, on peut aussi remarquer la création de plus en plus de micro-structures éditoriales par des personnes qui ont commencé à publier sur des sites comme itchio (comme Jared Sinclair qui a créé sa boutique SpearWitch.com pour imprimer ses projets puis proposer ses services d’éditeur sur les projets qu’il prend sous son aile, mais aussi Cat Cat qui a lancé sa boutique-itch en ligne Peach Garden Games). On remarque aussi la mise en place de partenariats entre des maisons d’édition indé et des auteurices itchio (comme  Exalted Funeral qui diffuse et imprime de plus en plus de projets que l’on voit d’abord en numérique sur itchio). Je ne connais pas l’histoire personnelle et professionnelle de chacune de ces personnes, mais cela me semble plus qu’acceptable qu’elles finissent par créer leur propre structure ou se greffer à des structures pro déjà existantes. C’est normal, de mon point de vue, des années de pratique autodidacte peuvent équivaloir à des années de formation et d’expérience.

Alors la professionnalisation est plus que bienvenue pour pas mal de personnes qui passent tant d’heures à apprendre, expérimenter et se perfectionner. Ça fait aussi fort plaisir de voir qu’itchio n’est pas un site moqué par les éditeurices et le public, mais qu’il est pris au sérieux. Une remarque valable pour tous les projets, donc les jeux vidéo indé dont certains sont à la fois sur Steam et Itchio. C’est une chose également belle de voir que ce site accueille tous les projets : des plus pro et intimidants jusqu’aux plus amateurs et « rassurants » (si vous voulez vous lancer !)

À bientôt dans « itchio pour les nouvo » !

Merci d’avoir lu tout cet article ! Il s’agissait au départ d’une liste de points que j’avais écrits pour une émission radio qui n’a pas eu lieu. Le fichier trainait dans un coin depuis plus d’un an, alors j’ai organisé et développé chaque point en essayant de garder un texte concis, car chacune de ces idées pourrait être encore plus développée. Si vous voyez un intérêt, voire souhaitez participer à la rédaction des futurs articles parlant d’itchio, n’hésitez pas à vous manifester en commentaire ou sur le Discord CestPasDuJDR 🙂

Et merci bien sûr aux personnes qui ont accepté d’écrire un petit témoignage dans ce premier article! Pour un futur article entièrement centré sur les témoignages, n’hésitez pas vous aussi à nous dire ce que vous pensez de ce site, ses communautés, son impact sur votre façon de créer… Commentez ou envoyez-moi un petit message (“angela quidam” sur twitter et discord) 🙂

On se retrouve très bientôt dans un nouvel article sur itchio destiné à vous montrer les fonctionnalités de ce site : inscription, publication de contenus et toutes les bases utiles pour comprendre comment utiliser itchio. Le site qui démange !




Matthieu B


Passionné d’informatique et de jeux de rôle, aime beaucoup trop parler de lui à la 3ème personne. Publie sur C’est Pas du JDR, créateur de forthedrama.com, anime un collectif en ligne dédié au partage, l’entraide, la transmission et l’accessibilité des jeux de l’imaginaire.







angela quidam


Aime les jeux en solitaire, les dinosaures, la SF pas pioupiou, le body horror (en textes et jeux, pas en films). Tente de promouvoir au mieux l’accessibilité. Écrit parfois, traduit souvent, relit régulièrement, met en pages quotidiennement.







Gaël Sacré


Auteur, traducteur et journaliste dans le jeu de rôle et ailleurs. Auteur de Happy, Happy Together, Cos’île et Saga Héroïque. Fondateur d’Horizons Solarpunk et actif chez les Courants Alternatifs, C’est pas du jdr et JdR Solitaire, entre autres ! Vous pouvez me retrouver sur mon site : www.gaelsacre.com





angela quidam

Aime les jeux en solitaire, les dinosaures, la SF pas pioupiou, le body horror (en textes et jeux, pas en films). Tente de promouvoir au mieux l'accessibilité. Écrit parfois, traduit souvent, relit régulièrement, met en pages quotidiennement.

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